
Une période singulière
La farce financière continue.
Nous passerons sur l’épisode tragi-comique de la production de pétrole saoudienne (lundi c’était la certitude que les capacités de production saoudiennes étaient durablement amputées, et hier finalement Aramco, la compagnie nationale saoudienne d’hydrocarbure annonçait un retour à la normale de la production d’ici quelques jours), nous n’épiloguerons pas sur les variations du GBP à chaque nouvelle bouffonnerie sur le BREXIT, ni ne commenterons les réactions facétieuses du marché à chaque ‘avancée’ ou ‘escalade’ sur le sujet de la ‘guerre commerciale’.
Non ! Désormais le seul et unique sujet de préoccupation c’est la relance budgétaire par les dépenses et ou/ une réforme fiscale. C’est d’ailleurs l’élément le plus cité par les opérateurs comme soutien haussier pour le marché. L’idée n’est pas nouvelle, mais depuis la dernière réunion de la BCE la semaine passée, Mario Draghi a en quelques sorte décomplexé le sujet, voire levé un tabou.
Tout d’abord, jeudi dernier, le président de la BCE a délivré la marchandise. Mais pour ménager certaines susceptibilités (pour ne pas dire furie vu les réactions de certains banquier centraux) la BCE a annoncé (entre autres) une reprise des achats d’actifs de ‘seulement’ 20 milliards par mois. Le consensus attendait 30 milliards. Mais comme aucune date de fin n’est avancé, l’assouplissement quantitatif perpétuel est en marche pour grand nombre d’observateur.
Mais le plus intéressant, paradoxalement, fut le plaidoyer du président de la BCE en faveur d’une politique de relance budgétaire, annonçant que la banque centrale ne pouvait pas tout, et que la seule façon de voir les taux remonter serait donc la mise en place d’un programme ambitieux de relance budgétaire.
Pour les observateurs, désormais depuis jeudi dernier, les politiques monétaires ont atteint leur limite d’efficacité. Pas un article, commentaire ou intervention qui ne parlent désormais de la fin d’une époque…
Ce n’est pas la situation la plus confortable dont héritera Christine Lagarde. Même si l’on peut encore imaginer un élargissement des types d’actifs inclus dans les rachats et/ou l’augmentation du seuil de détention maximum d’une souche, voire des rachats de dettes des ménages (une version de l’hélicoptère monnaie moins indécente?).
Mais très certainement la façon la plus efficace de composer avec la fronde germano hollandaise sur la reprise de l’assouplissement quantitatif, sera de déplacer le débat sur l’attrait des politiques budgétaires, par le biais de l’objectif d’inflation (plus facilement atteignable avec des mesures fiscales de relance). Allemagne et Pays-Bas étant en excédent budgétaire et pestant contre la politique monétaire, auraient certainement plus de difficulté à s’opposer à un assouplissement du dogmatisme budgétaire.
Aux Etats-Unis la perception sur l’efficacité de la politique monétaire ne se pose pas dans les mêmes termes. C’est davantage l’indépendance de la FED qui suscite les commentaires. Mais la conclusion est la même, les politiques monétaires, par manque de ‘moyen’ (la BCE) ou parce qu’elles sont sous la pression d’une autorité politique et/ou des marchés, n’ont plus la capacité de délivrer suffisamment de sentiment positif pour continuer d’entretenir le marché.
C’est peut-être aller vite en besogne. Car si la FED ce soir ne délivre pas, la réaction des marchés sera un violent rappel du soutien que cette dernière lui confère.
Alors que les mandats de la banque centrale sur l’inflation (2.4% sur aout en inflation sous-jacente) et sur le chômage (3.7%) sont plutôt remplis, alors que les ventes aux détails et la confiance du consommateur sont toujours extrêmement bien orientés (assurant un socle robuste au PIB), la FED, malgré elle, (vraiment ?) aura l’obligation d’agir ce soir, abandonnant encore un peu de son indépendance vis-à-vis du politique, mais réagissant aussi à la pression indirecte de la BCE et du marché.
Le président américain se fendra, encore une fois, d’un nouveau tweet assassin à l’endroit de Powell, l’accusant de maintenir un dollar trop élevé alors que la BCE par son action de baisse de taux et d’achat quantitatif contribue à la baisse de l’EUR et donc améliore sa compétitivité. Tout ceci est lassant, non productif mais durera très certainement jusqu’à l’élection américaine.
Nous vivons décidément une période singulière.
Olivier Armangau
Les thèmes de la semaine
Marchés européens
Les marchés européens auront été menés de tout bord sur la période entre attentisme de la Fed, des gestes positifs sur le front commercial sino-américain, l’attentat sur les raffineries d’Aramco et le ralentissement chinois.
l’Eurostoxx termine la période en hausse modeste de 0.32% tandis que la volatilité s’inscrit en repli de 1.46%

Or noir et tensions géopolitiques
Ce week-end, les installations pétrolières d'Aramco en Arabie Saoudite ont été victime d'une attaque par drones. Les futures sur le Brent ont connu leur plus forte hausse historique avec près de 20% de hausse à l'ouverture des marchés lundi alors que les premières estimations des dégâts de l'attentat auraient amputé de 5% les approvisionnements mondiaux en pétrole et représenteraient une perte de production journalière de 5,7 millions de barils.
Toutefois, après que la presse internationale ait relayé l'information que la situation pourrait probablement perdurer pendant plusieurs mois, le ministre de l'énergie saoudien a déclaré que la production devrait reprendre à plein régime d'ici la fin septembre. Les prix du pétrole ont chuté mardi après ces informations rassurantes, le cours du Brent a notamment baissé de 6.5%.
Au-delà de la production pétrolière mondiale qui aura été impacté moins que prévu, ce sont les relations géopolitiques, notamment entre Washington et Téhéran, qui se sont tendus et peut-être de manière plus durable.
Alors que les rebelles Houthi au Yémen ont revendiqué l'attentat et menacé d'autres attaques, le secrétaire d'État américain Mike Pompeo a ouvertement accusé l'Iran ce dimanche. Le président Trump a également déclaré que les États-Unis était « locked and loaded »…
En réponse à ces accusations, Téhéran a nié officiellement en ce début de semaine toute implication dans les attaques contre les installations pétrolières saoudiennes et avertit Washington que l'Iran réagira à toute action portée à son atteinte.
Cependant, le ministère de la défense saoudien a tenu une conférence de presse ce mercredi, montrant un drone et des débris de missiles qu'il a qualifié de preuve « indéniable » de l'agression iranienne.
Dans ce contexte, le président américain a déclaré qu'il avait ordonné une augmentation majeure des sanctions contre l'Iran. Aucune explication n'a pour autant été donnée et il n'est pas évident de savoir comment les États-Unis peuvent augmenter de façon significative les sanctions contre un pays qui est déjà soumis à des sanctions économiques maximales.
Les marchés ne semblent apporter absolument aucune considération à la situation.
Quelques gestes sur le front commercial
Le président Donald Trump a décidé la semaine dernière de retarder de deux semaines l'imposition de droits supplémentaires de 5 % sur les produits chinois, par respect pour le 70e anniversaire de la République populaire le 1er octobre.
De plus, le président américain a fait savoir jeudi qu'il envisagerait un accord commercial intérimaire avec la Chine, même s'il ne le préfère pas. En réponse à cela, la Chine lèvera les droits de douane punitifs imposés sur le soja et le porc américains, a déclaré vendredi une agence de presse d'État.
Les négociateurs commerciaux des États-Unis et de la Chine se réuniront demain à Washington pour la première fois en personne en près de deux mois. Ces discussions, qui suivent les petits gestes de conciliation des deux parties, visent à ouvrir la voie à des négociations de haut niveau qui devraient avoir lieu au début d'octobre et qui permettraient de sortir d'une impasse de la guerre commerciale dans laquelle les deux économies s'enfoncent depuis des mois.
Aymeric Graindorge
IMPORTANT DISCLAIMER
Ce rapport est publié par La Financière Constance Inc. (LFC) le 18 septembre 2019 et s'adresse principalement aux investisseurs institutionnels. Il est fourni à titre de source générale d'information et ne doit pas être considéré comme un conseil en placement, une prévision ou une recherche, et ne constitue pas une recommandation, une offre ou une sollicitation d'achat ou de vente de titres dans un territoire quelconque ou d'adoption d'une stratégie de placement. L'information contenue dans ce rapport provient de sources jugées fiables ; cependant, l'exactitude et/ou l'exhaustivité de l'information n'est pas garantie par LFC, et LFC n'assume aucune responsabilité ou obligation de quelque nature que ce soit. Toutes les opinions exprimées sont sujettes à changement sans préavis. Les stratégies et véhicules d'investissement de LFC peuvent actuellement détenir des positions longues et/ou courtes sur les titres et dérivés mentionnés dans ce rapport. Le rendement passé n'est pas indicatif du rendement futur. Le présent rapport peut contenir des "informations prospectives" qui ne sont pas de nature purement historique. Les énoncés prospectifs ne garantissent pas le rendement futur et comportent des risques et des incertitudes inhérents aux facteurs économiques généraux. Rien ne garantit que les énoncés prospectifs se réaliseront. Nous vous mettons en garde de ne pas vous fier indûment à ces énoncés, car un certain nombre de facteurs importants pourraient faire en sorte que les événements ou les résultats réels diffèrent sensiblement de ceux qui sont exprimés ou sous-entendus dans tout énoncé prospectif formulé. Ce rapport ne peut être reproduit, distribué ou publié sans le consentement écrit de LFC.