
Quand tout est normal
Les marchés continuent leur lévitation. La crise sanitaire et ses répercussions économiques ne semblent avoir (pour le moment?) strictement aucun impact. Que les nouveaux cas de contamination aux États Unis soient les plus élevés depuis le début de la pandémie ou que des nouvelles mesures de confinement soient de nouveau mises en place dans plusieurs pays, n’affectent pas le sentiment d’euphorie qui prévaut sur les marchés depuis des semaines. Bien entendu les prévisions économiques pessimistes des FMI, commissions européennes, et autre OCDE sont considérées, plus que d’habitude, comme des données sans aucuns intérêts. Rien, absolument rien ne semble interpeller le marché sur le rythme de hausse et les éléments de soutien de celui-ci.
Le plus singulier (pour rester poli) dans l’environnement actuel, c’est que les justifications avancées par le marché sur la hausse de l’or (au plus haut depuis 2011) sont les éléments que le marché action ignore superbement. Donc l’or monte parce que l’on s’inquiète des répercutions économiques liées à la situation sanitaire, et le marché action monte parce qu’il est dans l’anticipation d’un recouvrement économique en V car la crise sanitaire finalement va se résorber rapidement. Finalement le thème de la croissance en V s’accommode à toute les sauces. C’est un soutien pour le marché action parce qu’il est dans la fameuse anticipation, et c’est un soutien pour le marché de l’or qui en doute très sérieusement !!
La saison des résultats qui débute la semaine prochaine est aussi l’occasion de juger de l’optimisme du marché. Les stratèges nous disent que les mauvais résultats des entreprises américaines (s&p500) sont déjà ‘pricés’ par le marché :
Avec un rebond de 40% depuis le 23 mars et un marché en léger repli depuis le début de l’année, on doit donc en conclure que ce que ‘price’ le marché c’est une anticipation de retour aux bénéfices d’avant covid-19 très rapide (contrairement à ce qu’annonce les entreprises elles-mêmes). Attendus en repli de 49% sur le trimestre, il y a beaucoup de place pour des surprises positives en matière de résultat. Une fois encore, compte tenu du caractère particulier de cette pandémie, et vu les anticipations, il ne serait pas surprenant que la sanction de marché soit quasi nulle en cas de mauvais résultats. Déjà les entreprises n’annoncent plus de ‘guidance’ (ou alors elles sont tellement larges que ça n’a plus aucun sens), mais surtout les intervenants considèrent que la baisse des résultats liée à cette pandémie n’a pas la même importance que lors d’une récession classique, car la cause n’est pas économique… De plus il n’est pas exclu que l’on revive avec les résultats ce qui se passe avec les statistiques économiques : Les résultats catastrophiques du trimestre offriront une base de comparaison extrêmement favorable pour le trimestre prochain !
Avec des valorisations en termes de PE à 12 mois plutôt confortables (supérieure à la moyenne de 5 ans et de 10 ans) la saison des résultats qui s’annonce pourrait quand même être un test du sentiment de marché.
Est-ce que les particuliers (qui semblent avoir contribué très largement à cette hausse en ligne droite) vont continuer d’être un soutien massif? Est-ce que la ‘traditionnelle’ volatilité estivale sera exacerbée par la hausse exceptionnelle du marché depuis des semaines? Les inquiétudes entourant les relations sino-américaines vont elle être ressorties du chapeau pour une prochaine ronde de consolidation?
Avec la normalisation de la situation économique, il sera de plus en plus difficile d’avoir des progressions importantes des indicateurs économiques et de sentiments d’un mois sur l’autre (puisque la base de comparaison du mois précédent sera de moins en moins mauvaise). Les éléments pour le scenario de la reprise en V seront alors moins ‘probants’. Sera-ce suffisant pour remettre en cause les anticipations haussières? Rien n’est moins sûr dans le contexte actuel.
Même si le taux de chômage américain enregistre des baisses importantes depuis 3 mois (avec des erreurs statistiques non prise en compte depuis 2 mois) avec un taux de 11% contre 4% avant la Covid, l’impact sur la consommation, qui représente 70% du PIB aura forcément des conséquences. Le marché à encore une fois une réponse pour cet élément : Un nouveau plan de soutien sera mis en place.
Les sondages montrent également que les individus, y compris ceux qui n’ont pas perdus leurs emplois, sont largement moins enclins à dépenser qu’auparavant. Au contraire, ils thésaurisent ou rationalisent leurs dépenses. Cela se traduira forcément dans les données économiques.
Les priorités de vie ne sont plus les mêmes non plus. Aussi bien du côté des salariés, qui se recentrent sur des considérations plus familiales et moins professionnelles, mais aussi du côté des entreprises qui trouvent un certain intérêt économique au travail à distance. Cette crise sanitaire accélère aussi certaines mutations, comme l’amélioration de la productivité par le recours à des robots, l’implémentation de l’intelligence artificielle pour remplacer des postes à faible valeur ajoutée. On notera par contre que le thème enjôleur de la réindustrialisation vers les pays d’origines (au détriment de la Chine) a disparu…
Microsoft illustre bien cette adaptation des entreprises, en ayant décidé de fermer tous ses magasins physiques
- Olivier Armangau
Les thèmes de la semaine
Marchés européens
Les marchés européens ont commencé le deuxième semestre de 2020 en hausse en raison d’espoir sur la découverte d’un vaccin contre le Covid et la publication des chiffres de l’emploi américain largement au-dessus des attentes qui laissent sous-entendre une reprise plus rapide que prévue. Le nombre de cas de Covid toujours en nette hausse dans le monde entier et le scepticisme d’un scenario de reprise en V ou toutefois minimisé cette tendance haussière, à la marge.
L’Eurostoxx gagne 1.79% sur la période et le Vstoxx recule de 1.85%.

Mise à jour rapide sur la situation du Covid
Au niveau mondial, le nombre de cas a dépassé les 12 millions ce mercredi et se rapproche des 550,000 décès. La tendance du nombre de cas continue d’être nettement positive, mais peut être expliqué en partie par une augmentation du nombre de tests. Toutefois, le nombre de décès reste dans la tranche des 4,100 à 4,800 par jour depuis la mi-mai.
Aux États-Unis, le nombre de cas journalier est toujours en hausse alors que le pays a dépassé le nombre total de 3 millions ce lundi. Le nombre de décès continue toutefois sa tendance descendante bien qu’un pic de plus de 900 décès a surgi ce mardi, le plus élevé depuis le 11 juin. Les autorités sanitaires s’inquiètent que ce ne soit que le début d’une inversion de la tendance en raison de la croissance du nombre de cas depuis mi-juin.
En Australie, la deuxième plus grande ville d'Australie a entamé un second confinement en réponse à une recrudescence des nouvelles infections par coronavirus. Les cinq millions d'habitants de Melbourne ne pourront plus quitter leur domicile pendant six semaines, sauf pour des raisons essentielles. Et les frontières entre l'État de Victoria, dont Melbourne est la capitale, et les États voisins ont été fermées mardi. Le Premier ministre de l'État de Victoria, Daniel Andrews, a annoncé le verrouillage de Melbourne mardi après que l'État ait connu 191 nouvelles infections, son plus grand nombre quotidien depuis le début de la pandémie.
Enfin au Brésil, le président, Jair Bolsonaro, a été testé positif au Covid mardi après avoir passé des mois à minimiser sa gravité alors que les décès se multipliaient rapidement dans le pays. Il s’est toutefois dit confiant de pouvoir se remettre rapidement du coronavirus grâce à un traitement à l'hydroxy chloroquine, le médicament antipaludéen qui fait débat et dont l'efficacité contre le virus n'a pas été prouvée.
Emploi américain
Le département du Travail a déclaré des créations d'emplois non-agricoles de 4.8 millions au mois de juin 2020, contre 3.23 millions estimé par le consensus. Ce chiffre est le plus élevé jamais enregistré sur un mois depuis le début du suivi des chiffres de l'emploi en 1939.
Le taux de chômage a ainsi diminué en juin, reculant à 11.1% contre 13.3% en mai et 12.5% attendu par le consensus. De plus, le taux de participation au marché du travail s'est amélioré de 0.7%, pour s'établir à 61.5% en juin – un niveau toutefois inférieur de 1.9% à celui de février avant les premières mesures contre la pandémie de coronavirus.
Il est important de relever toutefois que pour le deuxième mois consécutif il y aurait à nouveau eu une « erreur de classification » lors de la publication du taux de chômage qui aurait normalement dû être plus élevé de 1% (soit 12.1% au lieu des 11.1%) selon le bureau des statistiques du travail.
Poutine continue son règne
Après deux décennies au pouvoir en Russie, soit comme Président, soit comme Premier ministre, Vladimir Poutine vient de s’offrir la possibilité de gouverner jusqu’en 2036.
Un vote sur des réformes constitutionnelles – contenant plus de 200 changements – s’est déroulé la semaine dernière en Russie. Parmi ces réformes, l'interdiction du mariage homosexuel - en définissant le mariage comme étant entre un homme et une femme - et l'introduction d'une référence à la "foi en Dieu" ancestrale de la Russie. Mais surtout, ces réformes comprennent une remise à zéro de la limite du mandat de M. Poutine en 2024, lui permettant ainsi de remplir deux autres mandats de six ans.
À 67 ans, Vladimir Poutine, n'a pas dit qu'il se représenterait à la présidence à la fin de son mandat actuel en 2024, mais il a déclaré qu'il était vital qu'il ait la possibilité de le faire.
Ces résultats du vote ont toutefois été vivement critiqués, notamment par Golos, un groupe indépendant de surveillance des élections russes, qui a fustigé le vote, alléguant de nombreuses violations de la démocratie. Dans un premier temps, les chiffres fournis par les responsables des élections indiquent une approbation des réformes à près de 78% avec un taux de participation de 65%. Dans un second temps, les publicités pour le vote sur les changements constitutionnels mentionnaient à peine qu'il remettrait à zéro la limite des mandats de Poutine – dont la cote a récemment atteint son niveau le plus bas depuis 20 ans – et les opposants n'ont pas pu faire campagne dans les médias.
Loi de sécurité passée à Hong-Kong
La nouvelle loi chinoise controversée sur la sécurité nationale pour Hong Kong est entrée en vigueur mercredi dernier. Cette loi a suscité la condamnation de certains pays, dont les États-Unis, Canada, le Royaume-Uni et fait craindre que Pékin continue d'empiéter sur l'autonomie de Hong Kong en restreignant un certain nombre de ses libertés.
La loi en question couvre la sécession, la subversion, le terrorisme et la collusion avec les forces étrangères. Les personnes reconnues coupables de tels crimes sont passibles de peines maximales d'emprisonnement à vie. La loi accorde ainsi à la Chine continentale plus de pouvoirs pour s'ingérer dans les affaires de Hong Kong. Parmi les mesures, le gouvernement chinois va également créer une agence de sécurité nationale à Hong Kong qui ne sera pas sous la juridiction du gouvernement local. De plus, les autorités de la Chine continentale exerceront leur compétence dans les affaires « complexes » telles que celles impliquant un pays étranger ou les questions considérées comme constituant une menace majeure et imminente pour la sécurité nationale.
Ainsi, cette loi a soulevé une condamnation internationale car elle suscite la crainte qu'elle ne soit utilisée pour réduire les voix de l'opposition dans le territoire semi-autonome et qu’elle réduira sévèrement les libertés politiques des citoyens.
- Aymeric Graindorge
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Ce rapport est publié par La Financière Constance Inc. (LFC) le 8 juillet 2020 et s'adresse principalement aux investisseurs institutionnels. Il est fourni à titre de source générale d'information et ne doit pas être considéré comme un conseil en placement, une prévision ou une recherche, et ne constitue pas une recommandation, une offre ou une sollicitation d'achat ou de vente de titres dans un territoire quelconque ou d'adoption d'une stratégie de placement. L'information contenue dans ce rapport provient de sources jugées fiables ; cependant, l'exactitude et/ou l'exhaustivité de l'information n'est pas garantie par LFC, et LFC n'assume aucune responsabilité ou obligation de quelque nature que ce soit. Toutes les opinions exprimées sont sujettes à changement sans préavis. Les stratégies et véhicules d'investissement de LFC peuvent actuellement détenir des positions longues et/ou courtes sur les titres et dérivés mentionnés dans ce rapport. Le rendement passé n'est pas indicatif du rendement futur. Le présent rapport peut contenir des "informations prospectives" qui ne sont pas de nature purement historique. Les énoncés prospectifs ne garantissent pas le rendement futur et comportent des risques et des incertitudes inhérents aux facteurs économiques généraux. Rien ne garantit que les énoncés prospectifs se réaliseront. Nous vous mettons en garde de ne pas vous fier indûment à ces énoncés, car un certain nombre de facteurs importants pourraient faire en sorte que les événements ou les résultats réels diffèrent sensiblement de ceux qui sont exprimés ou sous-entendus dans tout énoncé prospectif formulé. Ce rapport ne peut être reproduit, distribué ou publié sans le consentement écrit de LFC.