
Le clivage de la société américaine : Le vrai risque pour le marché?
La fameuse seconde vague à laquelle nous faisons face ne devrait être une surprise pour personne.
Elle a été largement anticipée par le consensus médical, depuis de nombreux mois, ‘simplement’ en se fiant à l’historique d’autres maladies respiratoires.
Maintenant qu’elle se concrétise un peu partout, elle est présentée comme une justification ‘logique’ au repli du marché.
Et bien entendu, le consensus est désormais unanime sur le sujet, quand il s’en gausser depuis des mois.
La mécanique est immuable. Comme pour la 1ere vague (ou tout autre élément important), on ignore, puis on sous-estime, ensuite on panique et on se rassure à mesure que les banques centrales et gouvernement interviennent.
Ce que nous expérimentons sur le marché depuis quelques jours n’échappe pas à la règle.
Désormais (pour combien de temps?) le verre est à moitié vide.
Et le spectre du re confinement revient hanter les marchés. D’autant plus facilement qu’à présent l’espoir du rebond économique rapide ne fait plus recette à la faveur de statistiques moins positives (l’activité économique mesurée par IHS Markit s’est ralentie en septembre à cause d’un repli dans les services), mais malheureusement logiques dans le contexte actuel.
Pourtant, rien n’a fondamentalement changé depuis des mois.
Il n’y a pas plus d’incertitudes. Au contraire, nous avons davantage de visibilité sur le vaccin, un retour d’expérience pour gérer les urgences, une résilience personnelle, une adaptation des entreprises, et la conviction d’un soutien monétaire innovant.
Tous les acteurs économiques, financiers, monétaires, gouvernementaux ont appris durant la pandémie ce qui réduit le poids des incertitudes.
Les premiers agrégats économiques après le choc récessif de mars avril étaient forcément (comparaison favorable) très forts. D’autant plus que les stimulations économiques et monétaires étaient sans précédents. A mesure que le reprise s’est installée, inévitablement les statistiques se sont normalisés et l’utopie de la croissance en V s’est dissipé.
Les atermoiements entre démocrates et républicain sur le vote du nouveau plan de soutien contribuent également à l’évanouissement des illusions économiques.
Cette pause du marché aurait pu se matérialiser depuis longtemps.
Si elle intervient maintenant (sur des éléments justificatifs qui ne sont pas nouveaux) c’est peut-être aussi parce que les tensions autour de la campagne électorale sont de plus en plus nettes entre les deux camps.
A six semaines de l’élection et à 5 jours du premier débat entre Biden et Trump (ordre alphabétique), et alors que le clivage entre démocrate et républicain n’a jamais été aussi fort, les intervenants semblent se préoccuper de l’environnement social.
Dans un climat délétère, et alors que les votes par correspondance ont déjà commencé bon nombre d’observateurs politiques craignent comme en 2000, des actions judiciaires de contestations. Il y a un enjeu très important sur les votes par correspondance et déjà des batailles judiciaires entre les deux partis pour les dates de recevabilité des votes, et l’envoie des bulletins.
Les partisans de Trump étant plus enclin à voter en personne alors que ceux de Biden voteraient davantage par correspondance, il semble tout à fait probable que le soir du vote, et alors que ne seront pas encore dépouillé la totalité des votes par correspondances, les résultats soient donc favorables à Trump.
Mais une fois les votes par correspondances comptabilisés, et si Biden l’emporte, il sera facile pour Trump d’accuser les démocrates d’avoir voler les élections. Le président a déjà préparé sa base électorale à un tel scenario.
Dans le même esprit, il a hier refusé de s’engager à une passation pacifique du pouvoir au cas ou il perdrait les élections. Cette nouvelle provocation qui repose davantage sur l’équivoque de son propos que sur une réelle volonté, illustre la fracture entre les deux camps et contribuent encore un peu à la division de la société américaine.
Alors que nous sommes dans la dernière ligne droite pour les élections et qu’il n’y a toujours pas de débat d’idée entre les deux candidats, l’opposition frontale entre les 2 partis se matérialise systématiquement lors de chaque événement.
Ainsi, le décès en fin de semaine passée, de Ruth Bader Ginsburg à inévitablement révélé le climat détestable qui prévaut aux États Unis. Donald Trump veut nommer une nouvelle juge (conservatrice pour mieux ancrer la droite au sein de l’institution) et les démocrates argumentent qu’il faut attendre l’issu des élections pour désigner un nouveau juge.
Même la police fédérale craint des violences, dans un contexte de tension raciale de nouveau extrême.
La radicalisation des opinions et la rupture sociale accélérée par la pandémie de Covid, modifie considérablement la société américaine et précarise l’optimisme et le dynamisme caractéristique de cette économie.
La confiance des acteurs économiques (ménages et entreprise) est la clé de la croissance du PIB américain. Plus elle s’érode et plus le recouvrement économique post Covid sera délicat. C’est assurément l’un des enjeux principaux de la campagne électorale.
- Olivier Armangau
Les thèmes de la semaine
Marchés européens
Les espoirs de l’arrivée proche d’un vaccin de la semaine dernière ont laissé place à la peur d’une seconde vague (et de nouvelles mesures plus strictes). Les grandes banques mondiales se sont fait pointer du doigt ce week-end et les relations sino-américaines riment toujours avec tensions. Ainsi, sur la période, les marchés européens sont ressortis en forte baisse et avec une forte hausse de la volatilité.
L’Eurostoxx 50 baisse de 4.72% sur la période et le Vstoxx augmente de 20.94%.

Craintes grandissantes sur l’évolution de la Covid-19
Les inquiétudes se sont à nouveau intensifiées concernant une deuxième vague d'infections du coronavirus et les investisseurs envisagent la perspective de nouvelles mesures de confinement très contraignantes qui freineraient la reprise économique.
Au Royaume-Uni, en Espagne et en France, les gouvernements réfléchissent à des renforcements de restrictions.

Les États-Unis restent « officiellement » de loin le premier pays impacté par la Covid-19 avec plus de 7.1 millions de cas et désormais plus de 200,000 morts. Toutefois, la propagation du virus semble se stabiliser autour des 40,000 cas par jours depuis un mois, après les plus hauts de juillet avec plus de 70,000 cas journaliers.
Enfin, au niveau mondial, nous avons dépassé les 32 millions de cas et nous atteindrons le million de personne décédées dans les prochains jours. La saisonnalité défavorable (autonome hiver) n’améliorera pas les statistiques.
FinCEN Files
Une enquête menée par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), BuzzFeed News et plus de 100 partenaires médiatiques dans 88 pays, a dévoilé comment les grandes banques mondiales ont brassé d'énormes sommes de fonds prétendument illicites dans le monde entier, même après avoir constaté des irrégularités.
Cette enquête est issue d’une fuite de documents du réseau américain de lutte contre les crimes financiers (FINancial Crimes Enforcement Network) et implique environ 2 milliards de dollars de transactions signalées comme « suspectes » par les services de conformité internes des banques entre 1999 et 2017.
Cette enquête a notamment soulevé deux points importants dans la lutte contre le blanchiment d’argent:
Les banques ferment les yeux sur les activités suspectes tant qu’elles ont rempli leur cahier des charges, consistant à envoyer des demandes de renseignements sur ces clients (sans chercher à avoir les réponses) et à déposer des rapports d’activités suspectes (nommées SAR) lorsqu’il y a lieu (ce qu’elles n’hésitent pas à faire à de multiples reprises sur des mêmes clients sans cesser d’opérer les transactions).
Les autorités en charge de la lutte du blanchiment d’argent n’enquêtent pas. Le programme SAR du FinCEN, faisant initialement des banques la première ligne dans la lutte contre le blanchiment d'argent, est principalement devenue base de données d’intelligence pour la surveillance de masse. Selon certaines sources, la plupart des déclarations suspicieuse ne sont même pas lues, et encore moins prises en compte.
Fergus Shiel, du Consortium international des journalistes d'investigation, a également déclaré que les dossiers divulgués étaient seulement « un aperçu de ce que les banques savent des vastes flux d'argent sale à travers le monde ».
Ce rapport publié dimanche a lourdement impacté les valeurs financières qui font déjà face à la problématique des taux bas à négatif. JPMorgan (-3.1%), HSBC (-5.3%), Standard Chartered Bank (-5.8%), Deutsche Bank (-8.8%) et Bank of New York Mellon (-4%) ont été citées dans le rapport pour avoir brassé de l'argent sale, même après avoir promis au gouvernement de surveiller plus attentivement le blanchiment d'argent. Les actions HSBC ont même atteint leur plus bas niveau en 25 ans.
La Chine crée sa propre liste noire
En réponse aux actions des États-Unis, avec le bannissement des activités de Huawei et de TikTok, la Chine a déclaré ce week-end qu’elle préparait sa propre liste noire intitulée « liste d'entités non-fiables », qui comprendra des entreprises du monde entier.
Les dispositions de la liste des entités peu fiables publiée samedi ont exposé les conséquences pour une entité étrangère - une entreprise, une organisation ou un individu d'un autre pays - qui est considérée comme un danger pour « la souveraineté nationale, la sécurité ou les intérêts de développement de la Chine ».
Le gouvernement chinois intensifie ainsi la pression sur les entreprises étrangères pour qu'elles n'aillent pas à l'encontre de Pékin, alors que la Maison Blanche continue de cibler certaines des plus grandes entreprises technologiques du géant asiatique.
Cette nouvelle intervient après que le ministère américain du commerce ait annoncé l'interdiction des transactions américaines utilisant WeChat, une application de messagerie sociale exploitée par le géant technologique chinois Tencent, et dans le contexte de la vente des activités américaines de l’application TikTok, poussé par Donald Trump.
- Aymeric Graindorge
IMPORTANT DISCLAIMER
Ce rapport est publié par La Financière Constance Inc. (LFC) le 24 septembre 2020 et s'adresse principalement aux investisseurs institutionnels. Il est fourni à titre de source générale d'information et ne doit pas être considéré comme un conseil en placement, une prévision ou une recherche, et ne constitue pas une recommandation, une offre ou une sollicitation d'achat ou de vente de titres dans un territoire quelconque ou d'adoption d'une stratégie de placement. L'information contenue dans ce rapport provient de sources jugées fiables ; cependant, l'exactitude et/ou l'exhaustivité de l'information n'est pas garantie par LFC, et LFC n'assume aucune responsabilité ou obligation de quelque nature que ce soit. Toutes les opinions exprimées sont sujettes à changement sans préavis. Les stratégies et véhicules d'investissement de LFC peuvent actuellement détenir des positions longues et/ou courtes sur les titres et dérivés mentionnés dans ce rapport. Le rendement passé n'est pas indicatif du rendement futur. Le présent rapport peut contenir des "informations prospectives" qui ne sont pas de nature purement historique. Les énoncés prospectifs ne garantissent pas le rendement futur et comportent des risques et des incertitudes inhérents aux facteurs économiques généraux. Rien ne garantit que les énoncés prospectifs se réaliseront. Nous vous mettons en garde de ne pas vous fier indûment à ces énoncés, car un certain nombre de facteurs importants pourraient faire en sorte que les événements ou les résultats réels diffèrent sensiblement de ceux qui sont exprimés ou sous-entendus dans tout énoncé prospectif formulé. Ce rapport ne peut être reproduit, distribué ou publié sans le consentement écrit de LFC.