
La surprise du chef et le mystère de l’inflation
Après le PIB c’est au tour des statistiques de l’emploi de dresser un tableau plus que flatteur de l’économie américaine. Avec 236 000 créations d’emploi le mois dernier et un taux de chômage de 3.6% le ralentissement américain ne semble guère se matérialiser. Les actions préventives et ou de soutiens de la banque centrale permette au cycle de se poursuivre.
C’était sans compter sur le tweet impatient du Président américain. Alors qu’il semblait acquis qu’un accord serait annoncé vendredi, les nouvelles menaces du président de relever les taxes douanières sur les produits chinois pourraient, si elles sont mises à exécutions, couter environ 1% au PIB du fait du ralentissement commercial qui découlerait de cette ‘guerre commerciale’. Alors que la situation économique est le critère principal pour les américains, le président Trump en compagne pour sa réélection, partirait d’un mauvais pied avec un tel fardeau. Le marché en déduit donc que c’est une nouvelle fois, l’application de la méthode Trump. Pourtant les sources gouvernementales américaines ainsi que le négociateur en chef ont bien confirmé cette intention de relever de 25% les droits de douanes (passant donc à 35%) sur les 200 milliards de produits chinois déjà taxés.
De façon plutôt surprenante, la baisse du marché sur les derniers jours s’est accompagnée d’une forte hausse de la volatilité. Plus précisément ce qui surprend c’est que ces achats massifs de volatilité se sont faits alors que les investisseurs ont ‘peu’ de positions à protéger et que le consensus s’attendait largement à une pause du marché. En fait, le niveau des positions vendeuses de volatilité avait atteint ces derniers jours ses niveaux historiques les plus élevés. Donc l’achat de volatilité qui a poussé le VIX à la hausse de 50% sur 2 jours est certainement davantage le fait de rachat de positions vendeuses (afin d’éviter les déconvenues de février 2018 et décembre 2018) plutôt que d’achat de couverture.
Alors qu’en Europe la commission européenne a revu à la baisse une fois encore ses prévisions de croissance pour 2019 et 2020 (on pourrait d’ailleurs s’interroger sur la définition de prévision tant celle-ci sont revues fréquemment et adapter en fonction des dernières publications économiques) il est intéressant de noter que Brexit ou pas, les prévisions de la banque centrale anglaise quant au rythme de croissance du Royaume Uni, sont supérieures à celles de l’union européenne !
Avant la conférence de presse de la réunion du comité de politique monétaire de la FED, le marché tablait très largement sur une nouvelle baisse des taux d’ici la fin d’année, se basant sur une faible inflation et des anticipations d’inflation également faibles. Il a été douché par monsieur Powell qui qualifiait cette faible inflation de transitoire. Au-delà de la sémantique, il semble bien néanmoins, comme aimait à le souligner madame Yellen, qu’il y ait un ‘mystère’ au tour de l’inflation. Et ce mystère pourrait perdurer si la productivité américaine continue sur sa lancée actuelle.
Elle est ressortie en hausse de 3.6% au 1er trimestre, représentant une hausse de 2.4% sur un an. Une telle amélioration de la productivité ne s’est vu qu’au sortir de la récession provoquée par la crise de 2008.
Il serait bien présomptueux d’expliquer d’où vient cette productivité mais il semble désormais acquis que les progrès technologiques (qui se déclinent désormais sur toute la chaine de valeur, y compris et particulièrement dans les services) résultant d’investissements importants en ‘nouvelles technologies’ soient à l’origine d’une grande partie de l’explication.
Cette amélioration de la productivité permet aux entreprises d’amortir la hausse des salaires (sans incidence donc sur les couts de production et donc les prix de vente) et donc de préserver leurs marges, voire de les améliorer. La productivité pèse donc ‘naturellement’ sur l’inflation et si son rythme se poursuit cela sera certainement un argument de poids pour la FED pour justifier, au minimum, sa patience sur les taux, voire une baisse des taux si concomitamment les conditions financières se détériorent encore (en cas de retour du stress sur les marchés) et si les enquêtes ISM se traduisent par une dégradation de la croissance américaine.
Bonne semaine,
Olivier Armangau
Les thèmes de la semaine
Marchés européens
Les marchés européens ont connu une mauvaise semaine en raison du discours moins « dovish » qu’attendu de la part de Jerome Powell et de la reprise des tensions dans les négociations de l’accord sino-américain. Les dégâts ont toutefois été limités.
L’Eurostoxx 50 perd 2.77% sur la période et la volatilité remonte, le Vstoxx prend 33%.

Retournement de situation
Les avancées des négociations commerciales entre la Chine et les États-Unis ont évoluées de façon inattendue ce week-end. N'appréciant pas la tournure que ces discussions prenaient, Donald Trump a menacé la Chine de nouveaux droits de douanes dimanche dernier.
Il semblait que les Chinois étaient devenus trop confiants dans les négociations, estimant qu'ils n'avaient plus de risque de taxation. Essayant ainsi de revenir sur des concessions précédemment faites, notamment sur le transfert de propriété intellectuelle.
Les menaces du président américain s'appliquent à l'intégralité des exportations chinoises. Une première augmentation de tarifications à 25% sur 200 milliards de dollars d'importations qui étaient jusqu'à présent taxé à 10% seraient mises en place dès vendredi si les discussions n'avançaient pas d'ici là. Puis la mise en place de 25% de droits de douanes sur 325 milliards de dollars de produits encore non taxés si un accord ne voyait pas le jour sous peu.
Malgré cette escalade de tension, la délégation chinoise maintient sa visite à Washington cette semaine pour continuer les négociations. Le vice premier ministre, Xi Liu, a confirmé son arrivée le 9 mai, soit un jour après la date initialement prévue.
Par ailleurs, les médias chinois ont rapporté que la Chine a une « confiance totale » et qu'elle peut surmonter ces défis dans les négociations commerciales.
Ce retournement de situation met en place des jeux politiques importants, face auxquels les marchés peuvent difficilement prévoir les issues. Cela ne semble cependant pas grandement les inquiéter. Alors que l'accord avait été intégré au cours des derniers mois, les marchés ont certes un peu tremblé en début de semaine mais la dynamique haussière semble s’installer de nouveau.
L’Iran perd patience
L'Iran a déclaré aujourd'hui qu'il allait reprendre l'enrichissement de ses réserves d'eau lourde et d'uranium enrichi au-delà des limites convenues dans le cadre de l'accord nucléaire de 2015. Téhéran a donné un ultimatum de 60 jours aux signataires européens (Allemagne, Chine, France, Grande-Bretagne) afin qu'ils ne parviennent pas à trouver un moyen pour le pays de continuer à vendre du pétrole et à commercer avec le monde.
Hormis la Chine et la Russie, « les membres restants de l'accord n'ont rempli aucune de leurs obligations » après le retrait des États-Unis, a déclaré le ministre des affaires étrangères iranien. Mais jusqu'à présent, les efforts déployés par l'Europe pour trouver un moyen de permettre à l'Iran de poursuivre son commerce international n'ont pas donné de résultats significatifs.
Le président Hassan Rohani a affirmé que ces mesures étaient conformes à l'accord de Vienne qui permet aux parties de suspendre partiellement ou intégralement certains de leurs engagements en cas de manquement imputé à une autre partie. De plus, le ministre des affaires étrangères a insisté sur le fait que l'Iran ne se retire pas de cet accord, mais il exige que les signataires respectent leurs promesses malgré les sanctions de Washington.
Brexit
C'est officiel, le Royaume-Uni participera bien aux élections européennes. Les discussions de Theresa May avec le parti travailliste n'ont pour l'instant pas permis de trouver une solution à cette impasse rendant la participation à ces élections obligatoire juridiquement.
De plus, Theresa May a de nouveau affirmé sa volonté de conserver ses fonctions jusqu'à cet automne au moins, afin de finaliser la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne – date butoir qui est fixée au 31 octobre.
Statistiques européennes
Contrairement aux indicateurs du sentiment économique et du climat des affaires, le Sentix augmente fortement sur le mois d’avril. Il atteint 5.3 contre 1.4 estimé et -0.3 en mars. Le sondage auprès de 2800 investisseurs et analystes sur leur confiance par rapport aux perspectives économiques repasse ainsi dans la zone d’optimisme.

Aymeric Graindorge
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Ce rapport est publié par La Financière Constance Inc. (LFC) le 8 mai 2019 et s'adresse principalement aux investisseurs institutionnels. Il est fourni à titre de source générale d'information et ne doit pas être considéré comme un conseil en placement, une prévision ou une recherche, et ne constitue pas une recommandation, une offre ou une sollicitation d'achat ou de vente de titres dans un territoire quelconque ou d'adoption d'une stratégie de placement. L'information contenue dans ce rapport provient de sources jugées fiables ; cependant, l'exactitude et/ou l'exhaustivité de l'information n'est pas garantie par LFC, et LFC n'assume aucune responsabilité ou obligation de quelque nature que ce soit. Toutes les opinions exprimées sont sujettes à changement sans préavis. Les stratégies et véhicules d'investissement de LFC peuvent actuellement détenir des positions longues et/ou courtes sur les titres et dérivés mentionnés dans ce rapport. Le rendement passé n'est pas indicatif du rendement futur. Le présent rapport peut contenir des "informations prospectives" qui ne sont pas de nature purement historique. Les énoncés prospectifs ne garantissent pas le rendement futur et comportent des risques et des incertitudes inhérents aux facteurs économiques généraux. Rien ne garantit que les énoncés prospectifs se réaliseront. Nous vous mettons en garde de ne pas vous fier indûment à ces énoncés, car un certain nombre de facteurs importants pourraient faire en sorte que les événements ou les résultats réels diffèrent sensiblement de ceux qui sont exprimés ou sous-entendus dans tout énoncé prospectif formulé. Ce rapport ne peut être reproduit, distribué ou publié sans le consentement écrit de LFC.